Les boomers sont-ils responsables ?

"Toute société malade, toute société en crise, cherche un, ou des, bouc(s) émissaire(s)".

Selon la thèse de René Girard le bouc émissaire permet de focaliser et de purger les tensions existantes dans la société en crise. Néanmoins, le bouc émissaire, par définition, n'est pas responsable du mal qui traverse la société, et n'est donc qu'une victime jetée en pâture à un peuple en colère cherchant un exutoire.

Les générations qui nous ont précédées sont-elles des boucs émissaires? Sont-elles exemptes de toutes responsabilité dans la crise économique et budgétaire qu'évoquais F. Bayrou sur TF1?

Voyons:

Pièce à conviction numéro 1:

Depuis 40 ans, la masse monétaire n'a fait qu'augmenter à un rythme de plus en plus rapide.

Ce régime inflationniste favorise les détenteurs d'actifs, dont la valeur surfe sur l'inflation (effet Cantillon), autant qu'il fausse les signaux prix et conduit à des allocations de capital désastreuses et donc à un effondrement de la productivité et du niveau de vie, puisque cette illusion de richesse nous conduit à consommer du capital plutôt qu'à en créer.

Autrement dit, c'est un régime de redistribution inverse qui consiste à transférer de la richesse de ceux qui la créent vers ceux qui détiennent des actifs (notamment parce qu'ils les ont achetés avant que la planche à imprimer parte en surchauffe).

Pièce à conviction numéro 2:

Sur la même période, la dette publique française a suivi la même trajectoire.

Conséquence logique d'un accord tacite entre des politiciens en recherche de moyens infinis afin d'acheter leurs réélections et d'une génération d'électeurs irresponsables sans cesse désireux de s'offrir une bonne conscience à coup d'argent magique.

Il fallait sauver le climat, garantir le plein emploi, accueillir toute la misère du monde, financer la culture, et donner des poneys roses à toutes les gamines de France. Qu'importe du coût puisque ceux qui décident de la dépense n'auront jamais à la payer.

Conséquence: Un État, qui, selon le bon mot de Bastiat, est devenu "cette grande fiction par laquelle tout le monde s'efforce à vivre aux dépends de tout le monde", et donc, un état, dont on ne pourrait sortir par les urnes puisque ceux qui prélèvent dans les poches sont plus nombreux que ceux qui les remplissent.

 

Pièce à conviction numéro 3:

Le secteur privé, incapable de générer de la croissance réelle compte tenu de l’appétit vorace du Moloch publique qui se repaissait sur son dos, n'a cessé d'accumuler des dettes.

Après la crise des dettes européennes (2010-2012), tous les autres pays européens ont conduit une baisse du levier sur les bilans privés et mené des programmes d'austérité afin que leurs économies exsangues puissent retrouver une marge de manœuvre salvatrice.

De notre côté nous avons préféré combattre la réalité par la démagogie, l'excès de dette par l'overdose de crédit, tout en accommodant ce surendettement par divers programmes de prêts publics, de refinancement, de taux zéros, parce que tout ce qui comptait c'était d'habiller le cadavre, "de sauver de l'emploi", "de faire de la relance"; bref de persévérer un peu plus dans cette trajectoire insoutenable quitte à sacrifier les décennies à venir (pourtant il suffisait de regarder le Japon pour savoir ce qu'il allait en résulter).

Pièce à conviction numéro 4:

Par conséquent, le coût de service de notre dette privée atteint des niveaux records (~21% du PIB), tandis que celle de tous les autres pays comparables n'a fait que baisser.

Comment en ayant le secteur public le plus obèse au monde, les prélèvements obligatoires les plus élevés au monde, les normes les plus contraignantes qui soit, et de surcroit, une pyramide de dette qui avale le peu de marge que les entreprises pourraient encore parvenir à générer, voudriez-vous que nous n'allions pas à une ruine certaine ?

Or, cette situation n'est pas dû à une crise, une conjoncture, une catastrophe climatique, ou un maraboutage, c'est la conséquence directe des choix politiques effectués depuis plus de 40 ans (j'en veux pour preuve que tous les pays utilisés comme comparatifs ont traversé les mêmes épreuves: les changements technologiques, l'euro, la crise financière, le covid, etc. mais s'en sortent avec moins de dette et un poids de la dette moins important).

Conclusion:

Nous vivons dans une bulle hors de la réalité depuis des décennies, ce qui est une particularité bien française. Nous pensons que les décisions immatures que nous avons prises depuis plus de 40 ans ne portent pas de conséquences.

Maintenant que la situation des comptes publics a créé une impasse politique totale et que l'on voit poindre une énième dégradation de la note de la dette française et une éventuelle intervention du FMI (ou équivalent à la sauce Euroland), certains commencent à réaliser ce qui était inévitable.

Mais ce n'est que la moitié du tableau: la situation catastrophique des comptes publics français est l'arbre qui cache la forêt du bilan privé. Quelque soit la solution adoptée pour le redressement des comptes publics, elle sera inefficace tant qu'une purge des dettes et des mauvais investissement ne sera pas aussi opérée dans le secteur privé. Nous avons deux horribles pilules à avaler, ce qui promet une crise grand format.

Dans une telle situation, il existe deux manières de procéder:

1) Suivre l'exemple du Japon et se condamner à des décennies perdues à mesure que nous repayons nos dettes en espérant voir un jour le bout du tunnel (et encore pas garanti que ça marche parce que contrairement au Japon nous sommes débiteurs et non créditeurs en net).

Ce qui consiste en fait à sacrifier l'avenir d'une génération pour protéger les privilèges de celle qui nous a poussé dans ce merdier.

2) Une thérapie du choc, contrainte ou choisie, forçant l'amaigrissement de cette puissance publique à l'obésité morbide, et une libéralisation tous azimut afin que le secteur privé retrouve des marges, de la compétitivité, des capacités d'investissement, et puisse donc progressivement sortir du surendettement.

Ce qui revient à ce que nos chers "boucs émissaires" aient la décence d'arrêter de faire les autruches, fasse place nette et nous laissent la latence nécessaire à réparer les conséquences de leurs choix stupides.

Dans tous les cas on va morfler, donc vous feriez mieux de vous protéger individuellement en détenant en propre un minimum de bitcoin, puisque c'est la seule chose qu'on ne pourra ni dévaluer ni saisir au cœur de la tempête qui point.

Ceci était un article partagé par Théo Mogenet sur X. Il a résumé ma pensée de manière claire et éloquente. C’est pourquoi je vous le partage tel quel.

Bon weekend,

— Axel

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